Henri, Catherine et les autres
Henri de Valois, fils de François Ier et Claude de France, devint roi de France sous le nom d’Henri II et régna de 1547 à 1559. Il épousa Catherine de Médicis en 1533. Ils étaient âgés tous deux de quatorze ans. Ils eurent dix enfants dont trois régnèrent, François II qui épousa Marie Stuart, reine d’Écosse, Charles IX et Henri III. Deux de leurs filles furent reines, Élisabeth par son mariage avec le roi d’Espagne, Philippe II, et Marguerite par son mariage avec Henri de Navarre, le futur roi de France, Henri IV. Cette postérité accrut l’affection que le roi portait à la reine, malgré son attachement à sa maîtresse Diane de Poitiers. Très bon père de famille, il veillait avec elle à l’éducation de leurs enfants.

Henri II
Roi à vingt-huit ans, il donna à sa maîtresse Diane de Poitiers un pouvoir considérable. Elle devint toute puissante. Sous son influence, Henri II laissa se développer la puissance des Guise hostiles aux protestants. Lors d’un tournoi organisé pour les fêtes du mariage de sa fille Élisabeth de France avec Philippe II, roi d’Espagne, le roi de France qui arborait les couleurs blanche et noire de Diane de Poitiers, et qui avait rompu déjà plusieurs lances, voulut finir sur un coup d’éclat. Il ordonna à son capitaine des gardes écossaises, Gabriel de Montgoméry, de courir contre lui, et fut mortellement blessé d’un coup de lance au front et à l’œil. Il semble que le célèbre Nostradamus, médecin, astrologue et conseiller du roi, avait, dans un quatrain, prédit cette fin. De même, l’observation des conjonctions astrales, auxquelles on attachait une grande importance, laissait prévoir une blessure mortelle à la tête.
L’historien Yvan Cloulas rapporte l’opinion des ambassadeurs vénitiens sur le physique du roi : “Henri a une haute stature. Il est fort bien proportionné. Il a le teint mat, un beau front dégagé sous une chevelure noire, des yeux sombres et brillants. Il porte la barbe en pointe, longue de deux doigts. Contarini trouve cette physionomie agréable bien qu’à son goût le nez soit trop grand et le dessin de la bouche ordinaire.” Brantôme, dans son Éloge d’Henri II, le dit “beau encore qu’il fut un peu moricaud”.
Ici, Clouet a représenté Henri II à trente-trois ans, en buste de trois quarts gauche, avec une expression de défiance dans le regard. Il est coiffé d’une toque ; son vêtement au petit col rabattu et son collier sont très légèrement esquissés. Cela suffit pour suggérer le volume, l’ampleur du buste et, par contraste, pour mettre en valeur le visage très élaboré. Celui-ci, aux contours précis (yeux, nez, oreille), offre une carnation à la sanguine, avec des hachures parallèles à la pierre noire, les deux crayons étant estompés par endroits, et parfois superposés pour créer des zones d’ombre et suggérer le modelé. Des traits fins et appuyés se distinguent sur l’ensemble de la chevelure et de la barbe. La clarté de la perle en pendant d’oreille accentue celle des prunelles et attire l’attention sur le début du cou qui dégage le visage allongé et l’équilibre en largeur. La lumière suggère les volumes, et des effets subtils soulignent le léger gonflement des paupières inférieures. Le toquet plat, ceinturé d’une ganse, laisse voir l’extrémité bombé du front et la chevelure au-dessus de l’oreille, contribuant, en allongeant le visage, à donner un peu plus d’aisance à l’attitude du roi engoncé dans ses vêtements.
La comparaison avec le portrait de Charles IX permet de saisir comment quelques détails vestimentaires situent le personnage dans l’espace de la feuille et accentuent l’impression d’âge mûr ou de jeunesse. Le roi, l’air un peu las, regarde avec hauteur, d’un air avisé et un brin sceptique le spectateur. Ce dessin a servi pour deux peintures, un portrait en buste et un portrait équestre.
Bibliothèque nationale de France
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Catherine de Médicis jeune
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Le goût des portraits

Charles IX enfant
Deuxième fils d’Henri II et de Catherine de Médicis, Charles IX succéda à son frère François II et régna dès l’âge de dix ans. On le dit alors « magnanime, affable, d’une intelligence éveillée ». Mais il était fort jaloux de son frère d’Anjou, avec lequel il ne pouvait rivaliser en galanterie et délicatesse. Alors que celui-ci avait arboré des boucles d’oreilles aux très longues pendeloques, le roi avait imposé le port de boucles d’or à cinquante gentilshommes qui l’accompagnaient. Sa mère incarna la permanence du pouvoir. Elle ne prit pas le titre de régente et fut qualifiée de « gouvernante de France ». Elle garda toujours une grande influence sur son fils. C’est sous le règne de Charles IX qu’eut lieu le massacre de la Saint-Barthélemy, en août 1572. C’est aussi sous son règne que le début de l’année, qui jusqu’alors était à Pâques, fut reporté au 1er janvier.
Clouet exécuta un portrait du jeune roi, à l’âge de onze ans, empreint d’une certaine vulnérabilité, étude préparatoire à une peinture conservée à Vienne, qui révèle quant à elle une certaine sensibilité.
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Portraits de famille

François d'Alençon enfant
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La reine envoie un peintre auprès de ses enfants le 16 janvier 1547, puis, en mai 1548, elle demande qu’on lui expédie des portraits « du côté que le peintre n’a pas accoustumé de les peindre et portraire » (Catherine de Médicis, t. I, p. 23) ; le 14 juin 1548, elle est satisfaite en constatant, grâce aux portraits, que ses enfants sont « bien amendés ».

Catherine de Medicis, reine de France, en veuve
La personnalité austère que cultivait Catherine de Médicis est illustrée par ce portrait, reproduit en peintures et miniatures. La reine porte la coiffure de deuil, le chaperon rigide aux bords arqués, avec une pointe s’avançant sur le front, recouvert par un long voile tombant dans le dos, coiffure qu’elle mit à la mode pour longtemps. François Clouet traduit avec un certain réalisme la maturité de la reine. Son intelligence, son sens de l’autorité, sa fermeté, transparaissent dans son regard, atténués cependant par une expression méditative. À cette époque, elle écrivait à sa fille la reine d’Espagne : « Recommandez-vous bien à Dieu, car vous m’avez vue aussi contente comme vous ne pensant jamais avoir autre tribulation que de n’être assez aimée à mon gré du roi votre père, qui m’honorait plus que je ne méritais, mais je l’aimais tant que j’avais toujours peur comme vous savez, et Dieu me l’a ôté. » En effet, bien que très épris de Diane de Poitiers, Henri II appréciait les dispositions de la reine pour l’amour conjugal, dont il disait : « Sur toutes les femmes du monde, il n’en savait aucune qui la valut en cela. »
Catherine aimait ses enfants passionnément. Dans ses lettres, elle écrit que c’est « le principal intérêt » qu’elle a dans le monde. Elle nourrissait, notamment un amour aveugle à l’égard d’Henri III. Pour qu’il ne s’éloigne pas, elle toléra sous son règne une grande liberté de mœurs. L’attachement à sa famille se manifesta jusque dans le grand mausolée qu’elle avait fait construire à Saint-Denis ; la crypte renferma les corps du roi, de la reine et de huit de leurs enfants. Seules la reine d’Espagne et la duchesse de Lorraine étaient absentes.
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