Costumes d’opéra de Louis-René Boquet


















Louis-René Boquet, élève de Boucher, était inspecteur des Menus Plaisirs du Roi – c'est à dire pour les fêtes et cérémonies de la cour. Il eut en 1758 la charge de dessinateur des costumes de l'Académie royale de musique. Ses dessins sont d'une rare élégance.
Certains de ces costumes furent destinés à des connaissances de Casanova, comme Melle Vestris. La liberté de mœurs dont faisaient preuve certaines d'entre elles arriva même à le surprendre...
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Costume d’Italienne pour Scanderberg (Antonio Vivaldi)
« Dans ce même temps une jeune Vénitienne très jolie, que son père Ramon exposa à l'admiration du public la faisant figurer dans les ballets, me mit pour une quinzaine de jours dans ses fers ; j'y serais resté davantage si l'hymen ne les eut brisés. [...] sa protectrice lui trouva un mari de compétence dans le danseur français nommé Binet, qui d'abord voulut s'appeler Binetti. Par là sa femme ne se vit pas obligée à changer en français son caractère vénitien qui la mit à même de déployer sa force dans plusieurs aventures qui lui donnèrent de la célébrité. [...] La Binetti fut privilégiée par la nature du plus rare de tous les dons. L'âge ne parut jamais sur sa figure avec une indiscrétion, dont les femmes ne connaissent pas la plus cruelle. Elle parut toujours jeune à ses amants et aux plus fins connaisseurs des traits surannés. Les hommes ne demandent pas davantage. »
Histoire de ma vie, I, p. 407.
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Costume de strasbourgeoise
« Je vais avant que l’opéra commence dans la salle où je vois les actrices qui s’habillaient, et je trouve la première assez revenante. Elle était bolonaise, et on l’appelait Narici. Après lui avoir fait la révérence, je lui demande si elle était sa maîtresse : elle me répond qu’elle n’était engagé qu’avec les entrepreneurs Rocco et Argenti. Je lui demande si elle a un amant, elle me dit que non ; je m’offre par le ton ; elle me met en ridicule, et elle m’invite à prendre pour deux sequins quatre billets pour les quatre représentations. Je lui donne deux sequins, je prends les quatre billets, et je les donne à la fille qui la peignait, qui était plus jolie qu’elle. Après cela je m’en vais ; elle me rappelle et je ne m’en soucie pas. Je vais à la porte ; je prends un billet de parterre, et je vais m’asseoir. »
Histoire de ma vie, I, p. 469.
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Annette et Lubin (Adolphe Benoît Blaise). Pas de deux. Melle Vestris
Marie-Rose Gourgaud-Dugazon (1743 ou 1746-1804) avait épousé le danseur Angiolo Vestris. Casanova rencontre le couple à Louisbourg : « Cette Vestris, malgré que fort jolie ne m’enchanta que par la tournure de son esprit et par ses grâces qui la déclaraient née pour être comédienne. Elle avait un seul défaut : elle grasseyait. Comme la Toscani fille avait encore un ton de réserve, je me suis permis à table d’adresser ma cour plus particulière à la Vestris, dont le mari n’était pas jaloux parce que très d’accord avec elle, il ne l’aimait pas. On avait distribué ce jour-là les rôles d’une petite comédie qu’on devait présenter à l’arrivée du duc. Un jeune auteur qui était à Louisbourg l’avait composée, en espérant qu’elle convaincrait le souverain qu’il méritait d’entrer à son service en qualité de poète.
Après le souper, parlant de cette petite pièce où la Vestris jouait le principal rôle, qui était d’une petite maîtresse, on la pria de le lire, et elle s’en acquitta avec la plus grande complaisance.
– Votre jeu est de l’âme, lui dis-je vous exprimez le sentiment de façon qu’on parierait que tout ce que vous dites est de vous, et non pas d’un autre. Quel dommage, madame, que la pointe de votre langue ne puisse pas prononcer la lettre canine*.
À ces paroles, toute la table me siffle. On me dit que ce n’était pas un défaut, mais un charme, l’expression devenait douce, plus intéressante, attrayante une plus grande attention, une actrice qui ne parlait pas ainsi était jalouse de celle qui avait cette prérogative. Je ne réponds pas mais je regarde la Vestris.
– Croyez-vous me dit-elle que je sois la dupe de tout cela ?
– Non, je ne le crois pas, car je vous rends justice.
– Un homme qui m’aime, et qui dit d’un air sincère quel dommage ! me fait beaucoup plus plaisir que ceux qui croient me flatter me disant que c’est une beauté ; mais il n’y a pas de remède.
– Comment, madame ? Il n’y a pas de remède ? J’en ai un dans mon apothicaire infaillible. Donnez-moi un soufflet, si demain je ne vous fais pas lire ce rôle sans que votre défaut paraisse ; mais si je vous le fais lire comme par exemple votre mari le lirait, permettez que je vous embrasse tendrement.
– J’accepte. Que faut-il que je fasse ?
– Pas autre chose que me laisser faire un sortilège sur votre cahier et je ne badine pas. Donnez-le moi. Vous n’avez pas besoin de le lire cette nuit. Demain, je le porterai chez vous à neuf heures du matin pour recevoir le soufflet ou le baiser, si votre mari n’y met pas opposition.
– Aucune, mais nous ne croyons pas aux sortilèges.
– Si mon sortilège manque, j’aurai le soufflet.
Elle me laisse le rôle. Nous parlons d’autre chose. […]
Je passe six heures à copier le rôle de la Vestris sans rien changer que la tournure des phrases, en substituant des paroles sans erre ou sans re, car on n’écrit plus la lettre erre comme l’aurait écrite mon grand-père, on écrit la lettre re. C’était une corvée, mais j’avais envie de baiser à la présence de son mari les belles lèvres de la Vestris. […]. Les procédés de cet homme m’outragent et me désespèrent, je dois penser à m’en défaire. Je change cette phrase ; je mets : Cet homme a des façons qui m’offensent et me désolent, il faut que je m’en défasse. Il me croit amoureuse de lui. Je mets : Il pense que je l’aime. Et je vais ainsi jusqu’à la fin, puis je dors trois heures, je m’habille, et Baletti qui voit la chose me prédit que le jeune auteur va me donner toutes les malédictions imaginables, puisque la Vestris va sûrement dire au duc qu’il doive l’obliger à écrire pour elle sans re. Et ce fut ce qui arriva.
Je vais chez la Vestris, elle se levait. Je lui remets sont rôle écrit par moi, elle lit, elle fait les hauts cris, elle appelle son mari, elle jure qu’elle ne veut plus jouer aucun rôle où il y aura des re ; je la calme et je lui promets de de lui copier tous ses rôles comme j’avais passé toute la nuit à lui copier celui-là. »
Histoire de ma vie, III, p. 529-530.
* Terme archaïque pour la lettre r.
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Danseuse-prétresse dans l’opéra-ballet pour les Fêtes d’Hébé de Rameau
« Il me conduisit après chez une fameuse actrice d’opéra qui s’appelait Le Fel, bien-aimée de tout Paris, et membre femelle de l’Académie royale de musique. Elle avait trois enfants en bas âge, charmants, qui voltigeaient dans la maison.
– Je les adore, dit-elle.
– La beauté de leur physionomie, lui répondis-je, a dans tous les trois un différent caractère.
– Je le crois bien. L’aîné est le fils du duc d’Aneci, celui-là est du comte d’Eguemont et le cadet est le fils de Maisonrouge qui vient d’épouser la Romainville.
– Ah ah ! Excusez de grâce. J’ai cru que vous étiez la mère de tous les trois.
– Je le suis aussi.
En disant cela, elle regarde Patu et elle donne avec lui dans un grand éclat de rire qui me fit rougir jusqu’aux oreilles. J’étais nouveau. Je n’étais pas accoutumé à entendre une femme empiéter ainsi sur les droits des hommes. Mademoiselle Le Fel n’était pas effrontée, elle était franche, et supérieure à tous les préjugés. »
Histoire de ma vie, I, p. 572.
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Costume pour un rôle d’Africaine
« Le soir nous allâmes tous au bal, où la Corticelli, toujours attentive à me causer tous les chagrins possibles, dansa comme il n’est pas permis que danse une jeune personne bien née. Elle fit des entrechats à huit, des pirouettes, des cabrioles, des battements à mi-jambe, enfin, toutes les grimaces d’une saltimbanque d’opéra. J’étais au supplice ! Un officier qui peut-être ignorait que je passais pour son oncle, mais qui peut-être n’en faisait que le semblant, me demanda si c’était une danseuse de profession. J’en entendais un autre derrière moi qui disait qu’il lui semblait de l’avoir vu danser au théâtre de Prague le carnaval dernier. Je devais accélérer mon départ, car je pressentais que cette malheureuse finirait par me coûter la vie si nous restions à Aix. »
Histoire de ma vie, II, p. 750.
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Costume pour Dardanus de Rameau
« On peut dire qu’elle danse jusqu’à la pensée. »
Favart, à propos de Camilla Veronese
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Costume pour Mlle Bernard dans Tancrède (André Campra) : une guerrière, suivante de Clorinde
« Les foyers des théâtres sont le noble marché où les amateurs vont exercer leur talent pour nouer des intrigues. J’avais su assez bien profiter de cette agréable école ; je commençais par devenir l’ami de leurs amants en titre, et je réussissais par l’art de ne jamais montrer la moindre prétention, et surtout de paraître non pas inconséquent, mais sans conséquence. Il fallait avoir toujours à l’occasion la bourse à la main, mais il s’agissait de peu de chose, la peine n’était pas si grande que le plaisir. J’étais sûr que d’une façon ou de l’autre on m’en tiendrait compte. »
Casanova, Histoire de ma vie, II, p. 78-79.
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Costume pour un rôle destiné à Mlle Allard dans Les Incas (Les Indes galantes, Jean-Philippe Rameau)
« Un autre jour chez Lani, maître des ballets de l’Opéra, j’ai vu quatre ou cinq filles accompagnées de leur mère auxquelles il donnait des leçons de danse. Elles avaient toutes l’âge de treize à quatorze ans, et l’air modeste de l’honnête éducation. Je leur disais des choses flatteuses, et elles me répondaient en baissant les yeux. Une d’elles avait mal à la tête, et je lui fais flairer de l’eau des Carmes ; son amie lui demande si elle a bien dormi.
– Ce n’est pas cela, répond l’enfant, je crois que je suis grosse.
À cette réponse inattendue je lui dis, comme une bête :
– Je n’aurais jamais pensé que madame fut mariée.
Elle me regarde, puis elle se tourne à l’autre, et elles se mettent toutes les deux à rire de toute leur âme. Je m’en suis allé tout honteux, et bien déterminé à ne plus supposer à l’avenir aucune pudeur dans les filles de théâtre. Elles se piquent de ne pas en avoir, et elles traitent de bêtes ceux qui leur en supposent. »
Histoire de ma vie, I, p. 572-573.
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Costume pour un rôle d’Indienne destiné à Melle Peslin dans Persée (Jean-Baptiste Lully)
« Le premier jour qu’on donna l’opéra il me permit de le suivre ; c’était une musique de Lulli. J’étais assis dans le parquet, précisément au-dessous de la loge où se trouvait Madame de Pompadour, que je ne connaissais pas. À la première scène voilà la fameuse le Maur qui sort de la coulisse, et qui au second vers fait un cri si fort et si inattendu que je l’ai cru devenue folle ; je fais un petit éclat de rire de très bonne foi ne m’imaginant jamais qu’on pourrait le trouver mauvais. Un cordon bleu qui était auprès de la marquise me demande sec de quel pays je suis, et je lui répondis sec que j’étais de Venise.
– Lorsque j’ai été à Venise j’ai aussi beaucoup ri au récitatif de vos opéras.
– Je le crois monsieur, et je suis aussi sûr que personne ne s’est avisé de vous empêcher de rire. »
Histoire de ma vie, I, p. 586.
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Costume de bergère pour l’opéra-ballet les Fêtes d’Hébé de Rameau
« Ce qui me fit aussi plaisir fut le silence de tous les spectateurs. En Italie on est à juste titre scandalisé de l’insolent bruit qu’on y fait quand on chante, et il faut rire après quand on remarque le silence qu’on observe quand on exécute le ballet. Il n’y a point d’endroit sur la terre où l’observateur ne trouve des extravagances, s’il est étranger, car s’il est du pays il ne peut pas les discerner. »
Histoire de ma vie, I, p. 577.
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Costume de femme avec plumes de paon
« De tout temps Venise eut des courtisanes célèbres plus par leur beauté que par leur esprit ; les principales de mes contemporaines furent cette Ancilla et une autre nommée Spina : l’une et l’autre, filles de bacarol ; l’une et l’autre mortes jeunes après s’être avisées de se donner à un métier par lequel il leur paraissait de s’anoblir. Ancilla à l’âge de vingt-deux ans se fit danseuse et Spina voulut devenir chanteuse. Celui qui fit devenir Ancilla danseuse fut un danseur nommé Campioni, Vénitien qui, dansant le sérieux, lui apprit toutes les grâces dont sa belle figure était susceptible, et l’épousa. Spina apprit la musique d’un castrato qui s’appelait Pepino da la Mamana qui ne pouvait pas l’épouser ; mais elle fut toujours moins que médiocre, et poursuivit à vivre du prix qu’elle retirait de ses charmes. Ancilla a dansé à Venise jusqu’à deux ans avant sa mort. »
Histoire de ma vie, I, p. 552.
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Costume pour le 3e acte d’Ismène et Isménias (Jean Benjamin de La Borde)
« On ne pouvait pas dire qu’elle n’était ni belle ni laide, car son caractère qui intéressait sautait aux yeux ; qu’était-elle donc ? Belle ; mais par des lois et des proportions inconnues à tout le monde, excepté à ceux qui se sentant par une force occulte entraînés à l’aimer avaient le courage de l’étudier et la force de parvenir à les connaître. Cette actrice [de la Comédie-Italienne] fut l’idole de toute la France, et son talent fut le soutien de toutes les comédies que les plus grands auteurs écrivirent pour elle, et principalement Marivaux. Sans elle ces comédies ne seraient pas passées à la postérité. On n’a jamais pu trouver une actrice capable de la remplacer, et on ne la trouvera jamais, car elle devrait réunir entre elles toutes les parties que Silvia possédait dans l’art trop difficile du théâtre, action, voix, physionomie, esprit, maintien, et connaissance du cœur humain. Tout dans elle était nature ; l’art qui accompagnait et avait perfectionné tout ne se laissait pas voir. »
À propos de Zanetta Balletti dite Silvia (1701-1758), Histoire de ma vie, I, p. 560.
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Costume pour Ismène et Isménias (Jean-Benjamin de Laborde)
« M’étant logé à l’Ours, après avoir dîné tout seul, je m’habille, et je vais à l’opéra sérieux italien que le duc faisait donner gratis au public dans le beau théâtre qu’il avait faît bâtir. Il était au cercle devant l’orchestre entouré de sa cour. Je suis allé me placer tout seul dans une loge au premier rang enchanté de pouvoir entendre sans la moindre distraction la musique du fameux Jumella [Nicola Jomelli] que le duc avait à son service. Un air chanté par un célèbre castrato m’ayant fait beaucoup de plaisir je claque des mains. Une minute après un homme vient me parler allemand d’un ton impoli. Je lui réponds les quatre mots qui signifient : je n’entends pas l’allemand. Il s’en va et un autre vient me dire en français que le souverain se trouvant à l’opéra, il n’était pas permis de claquer.
― Fort bien. Je viendrai donc quand le souverain n’y sera pas, car quand un air me fait plaisir, je ne peux m’empêcher de claquer.
Après avoir répondu ainsi, je vais faire appeler ma voiture, mais voilà le même officier qui me dit que le duc voulait me parler. Je vais avec lui au cercle.
― Vous êtes donc M. Casanova ?
― Oui monseigneur.
― D’où venez-vous ?
― De Cologne.
― Est-ce la première fois que vous venez à Stutgard ?
― Comptez-vous d’y faire un long séjour ?
― Cinq à six jours, si V. A. me le permet.
― Tant qu’il vous plaira, et il vous sera aussi permis de claquer.
À l’air suivant le duc claqua, et tout le monde fit de même ; mais l’air ne m’ayant pas fait plaisir je me suis tenu tranquille. »
Histoire de ma vie, II, p. 276.
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Costume pour un rôle féminin dans Ernelinde, princesse de Norvège (Philidor)
« Ce que j’ai trouvé extraordinaire, et qui me plut à l’excès fut du rouge mis à la façon que les dames de la cour le mettent à Versailles. L’agrément de cette peinture consiste dans la négligence avec laquelle elle est placée sur les joues. On ne veut pas que ce rouge paraisse naturel, on le met pour faire plaisir aux yeux qui voient les marques d’une ivresse, qui leur promet des égarements et des fureurs amoureuses. »
Histoire de ma vie, I, p. 757.
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Costume de sirène pour Mlle Guimard pour Le Ballet des sens (Jean-Joseph Mouret)
« Tout d’un coup après Duprés, je vois une danseuse qui comme une furieuse parcourt tout l’espace en faisant des entrechats à droite, à gauche rapidement mais ne s’élevant guère, applaudie à toute force.
– C’est la fameuse Camargot, mon ami, que tu es arrivé à Paris à temps de voir. Elle a aussi soixante ans. C’est la première danseuse qui a osé sauter, avant elle les danseuses ne sautaient pas, et l’admirable est qu’elle n’a pas de culottes.
– Pardon, j’ai vu.
– Qu’as-tu vu ? C’est sa peau qui à vrai dire n’est pas blanche.
– La Camargot, lui dis-je d’un air pénitent ne me plaît pas ; J’aime mieux Duprés.
Un zélé, très vieux, que j’avais à ma gauche me dit qu’étant jeune elle faisait le saut de basque et même la gargouillade et qu’il n’avait jamais vu ses cuisses malgré qu’elle dansât sans culottes.
– Mais si vous n’avez jamais vu ses cuisses comment pouvez-vous jurer qu’elle n’avait pas de culottes ?
– Oh ! Ce sont des choses qu’on peut savoir. Je vois que Monsieur est étranger.
– Oh ! pour ça oui. »
Histoire de ma vie, I, p. 576-577.
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Costume pour Dardanus, opéra de La Bruère
« Au second ballet de l’opéra, une danseuse habillée en pèlerine présentait dans son pas de deux son chapeau aux loges qui étaient sur le théâtre, comme pour demander l’aumône. J’étais dans la loge de la marquise Corti. Lorsque j’ai vu la danseuse sous moi, j’ai laissé tomber dans son chapeau ma bourse. Il y avait dix-huit à vingt ducats. Elle l’a mise dans sa poche en riant, et le parterre claqua des mains. J’ai demandé au marquis Belcredi qui était à mon côté si elle avait un entreteneur, et il me répondit qu’elle n’avait qu’un officier français qu’il me montra au parterre qui n’avait pas le sou. Il me dit qu’il allait toujours chez elle. »
Histoire de ma vie, II, p. 811.
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Costume pour Mlle Duperey dans le prologue d’Un amour des dieux (Jean-Joseph Mouret)
« Tout d’un coup j’entends le parterre qui claque des mains à l’apparition d’un grand et beau danseur masqué avec une perruque noire à longue boucles qui descendaient jusqu’à la moitié de sa taille, et vêtu d’une robe ouverte par-devant qui lui allait jusqu’aux talons. Patu me dit d’un air dévot, et pénétré que je voyais le grand Duprés. J’en avais entendu parler, et je m’y tiens attentif. Je vois cette belle figure qui s’avance à pas cadencés, et qui parvenue au bord de l’orchestre élève lentement ses bras arrondis, les meut avec grâce, les étend entièrement, puis les resserre, remue des pieds, fait des petits pas, des battements à la mi-jambe, une pirouette ensuite, et disparaît après entrant à reculons dans la coulisse. Tout ce pas de Duprés n’a duré que trente secondes. Le claquement du parterre et des loges était général ; je demande à Patu ce que cet applaudissement signifiait, et il me répondit sérieusement qu’on applaudissait aux grâces de Duprés, et à la divine harmonie de ses mouvements. Il avait, me dit-il soixante ans et il était le même que quarante ans auparavant.
– Quoi ? Il n’a jamais dansé autrement ?
– Il ne peut pas avoir dansé mieux. Car ce développement que tu as vu est parfait. Y a-t-il quelque chose au-dessus du parfait ? Il fait toujours la même chose et nous le trouvons toujours neuf, telle est la puissance du beau, du bon, du vrai qui pénètre l’âme. Voilà la véritable danse, c’est un chant ; Vous n’en avez point idée en Italie. [...]
À la fin du second acte voilà de nouveau Duprés avec son visage couvert d’un masque, cela va sans dire, qui danse, accompagné d’un air différent, mais à mes yeux la même chose. Il avance vers l’orchestre, il arrête sa taille un instant, très bien dessiné j’en conviens ; et tout d’un coup j’entends cent voix dans le parterre qui disent tout bas :
– Oh mon Dieu ! mon Dieu ! il se développe, il se développe.
Et vraiment il paraissait un corps élastique qui en se développant devenait plus grand. »
Histoire de ma vie, I, p. 575-576.
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Costume pour le chœur des Bactriens dans Zoroastre (Jean-Philippe Rameau)
« M. le comte de Loz ambassadeur du roi de Pologne Electeur de Saxe à Paris m’ordonna dans cette année 1751 de traduire en italien un opéra français susceptible de grandes transformations, et de grands ballets annexes au sujet même de l’opéra, et j’ai choisi Zoroastre de M. de Cahusac. J’ai dû adapter les paroles italiennes à la musique française des chœurs. La musique se conserve belle, mais la poésie italienne ne brillait pas. J’ai malgré cela reçu du généreux monarque une belle tabatière d’or ; et j’ai procuré un grand plaisir à ma mère. »
Histoire de ma vie, I, p. 607.
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Bibliothèque nationale de France, 2011