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Livres littéraires et religieux illustrés par Abraham Bosse

Les travaux d’Hercule
Les travaux d’Hercule

Bibliothèque nationale de France

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La moitié de l’œuvre de Bosse est consacré à l’illustration de livres. Parmi sa production, outre des ouvrages scientifiques et techniques, le livre religieux est bien représenté, de même que la littérature classique ou moderne, qui lui fournit l’occasion de quelques chefs-d’œuvre.

Les ouvrages littéraires

Moïse sauvé des eaux
Moïse sauvé des eaux |

Bibliothèque nationale de France

Bosse a-t-il attiré l’attention de Richelieu en travaillant à l’ouvrage du jésuite Jean-Baptiste Machault qui relatait l’entrée du roi après la reddition de La Rochelle ? Toujours est-il qu'il est choisi pour illustrer des ouvrages d’écrivains proches de Richelieu et qui tous sont au nombre des premiers académiciens en 1634. La mort du ministre ne met cependant pas un terme aux illustrations d’ouvrages d’auteurs proches de l’Académie. Ainsi grave-t-il le titre du Moïse sauvé... de Saint-Amant publié en 1653.

Ce n'est pas avant 1639 que Bosse grave d’après le peintre Claude Vignon. Leur collaboration se poursuit jusqu’en 1659. Ils ont donné le titre du Moïse sauvé… de Saint-Amant et surtout les illustrations de la Galerie des femmes fortes du père Le Moyne, ouvrage publié en 1647 ; les planches ont été gravées conjointement avec Gilles Rousselet, auteur de la figure debout du premier plan, gravée au burin. Plus discret mais plus subtil, le travail de Bosse consiste en la gravure à l’eau-forte des scènes du second plan qui correspondent toutes à un épisode précis de l’histoire des héroïnes.

Mariamne
Mariamne |

Bibliothèque nationale de France

La Pucelle d’Orléans
La Pucelle d’Orléans |

Bibliothèque nationale de France

Mais le grand travail pour Vignon et Bosse est l’illustration de La Pucelle, poème de Chapelain, académicien dès 1634, dont la rédaction avait été entreprise dès 1635 et dont les douze premiers chants ne furent publiés qu’en 1655. Un titre illustré et douze planches – une pour chaque livre du poème – gravés par Bosse d’après des dessins de Vignon, constituent le principal de l’illustration que complètent des vignettes et des lettres grises.

Jeanne d’Arc vient au secours du roi de France
Jeanne d’Arc vient au secours du roi de France |

Bibliothèque nationale de France

Pour quelques ouvrages, Bosse est l’auteur à la fois du dessin et de la gravure. C'est, par exemple, le cas pour l’Énéide de Virgile, traduite par un certain Pierre Perrin dont la publication, interrompue par la Fronde, s’étend sur dix ans. L’ouvrage connaît un succès attesté par une réédition en format plus petit pour laquelle Bosse grave deux nouveaux titres, mais les illustrations réimprimées à partir des mêmes planches y sont insérées pliées.

Les livres religieux

L’Extase de saint Augustin
L’Extase de saint Augustin |

Bibliothèque nationale de France 

Les livres publiés au 17e siècle sont pour plus des trois quarts des livres catholiques et cette proportion se retrouve dans les livres illustrés. Tout protestant soit-il, Bosse n’a pas répugné à graver des planches pour des ouvrages inspirés par la Contre-Réforme. La plupart de ces ouvrages sont de petits formats et, pour beaucoup, l’illustration en est peu abondante et manque d’originalité, constituée souvent d’un seul frontispice ou d’un titre illustré, images dont la place en tête du livre permet de faire connaître d’un seul regard son contenu. Les auteurs ou les libraires se servent, en effet, des représentations les plus convenues des saints, ce qui permet aux plus avertis une identification immédiate. D’autres frontispices sont constitués de scènes religieuses tirées du livre ou de figures allégoriques. Ainsi Bosse illustre-t-il le frontispice du second ouvrage d’Auvray, intitulé Modèle de la perfection… Jeanne Absolu  pour lequel il grave une composition dont l’inventeur est demeuré inconnu et dans laquelle le portrait de la religieuse est présenté par les figures de la Religion et de l’Amour divin, que complète un phœnix, l’ensemble étant explicité par une devise et un verset de l’épître de saint Paul aux Corinthiens.

Jeanne Absolu, religieuse
Jeanne Absolu, religieuse |

Bibliothèque nationale de France

L'Histoire de Jézabel
L'Histoire de Jézabel |

Bibliothèque nationale de France

Quelques ouvrages se distinguent dans cette production et, en premier lieu, une pièce de théâtre, Jezabel, représentée par les élèves du collège des jésuites de Rouen, certainement en 1635. Bosse a gravé six planches, y compris le titre illustré, pour le livret de cette tragédie en cinq actes inspirée du récit biblique de l’histoire de Jézabel ; il n’est pas impossible qu’il soit aussi l’auteur des dessins.
En 1662 Bosse grave cinq planches, un frontispice et une illustration par livre, destinées à la traduction de L’Imitation de Jésus-Christ, que Sacy fait éditer sous le pseudonyme de sieur de Beuïl, prieur de S. Val. Philippe de Champaigne et Lubin Baugin en avaient fourni les dessins. Le succès de cette traduction est prodigieux, à tel point que Bosse doit graver deux autres séries de planches pour des éditions in-16 et une édition in-8°. L’Imitation de Jésus-Christ est bien un des livres les plus publiés au cours du 17e siècle.

Le Christ invitant saint Pierre et saint André à être ses disciples
Le Christ invitant saint Pierre et saint André à être ses disciples |

Bibliothèque nationale de France 

Un autre ouvrage, l’œuvre de Tristan l’Hermite publiée en 1646, L’Office de la Sainte Vierge…  se distingue par son abondante iconographie. Elle comprend en effet, cinquante-deux cuivres qui sont des titres illustrés, des illustrations, des vignettes, des bandeaux, des lettres grises.

Dieu le Père
Dieu le Père |

Bibliothèque nationale de France  

David se repentant de son péché
David se repentant de son péché |

Bibliothèque nationale de France  

Bosse a été conduit à illustrer des ouvrages relevant de la foi réformée, beaucoup moins nombreux cependant que ceux d’obédience catholique. Il est vrai qu’à Paris la production de livres protestants est restreinte, l’interdiction de l’exercice du culte se doublant de celle de mettre sous presse et de vendre au public les livres concernant leur religion. Ceux-ci portent donc l’adresse de Charenton, quelquefois fictive, ou bien sont imprimés à Genève. Bosse a ainsi composé et gravé des frontispices pour deux bibles sorties des presses genevoises.

La Déroute des Jansénistes
La Déroute des Jansénistes |

Bibliothèque nationale de France

Le refus d’ornement, la volonté de faire sobre qui ont conduit l’inspiration de Bosse sont manifestes dans un Nouveau Testament publié à Charenton par Antoine Cellier en 1656 et dans un autre publié par le même libraire, dont les frontispices offrent des architectures dépouillées. Cependant, l’inspiration de Bosse fait naître une image beaucoup plus parlante aux yeux lorsqu’il compose et grave le frontispice des Consolations de l’âme fidèle contre les frayeurs de la mort…, du pasteur Charles Drelincourt, publiées en 1651 chez Antoine Cellier. L’ouvrage, qui rencontre un grand succès, s’ouvre sur un frontispice propre, tout autant que le texte, à effrayer le lecteur et qui, renouant avec la danse macabre, montre la Mort armée de sa faux entraînant au tombeau un cortège où figurent un vieillard, un enfant, un roi, un berger, une princesse et une femme de condition ordinaire.

Danse macabre
Danse macabre |

Bibliothèque nationale de France

Conduit pendant plus de cinquante ans et protéiforme, l’œuvre de Bosse permet d’entrevoir les différents publics touchés par les livres et leurs illustrations. Que de différences entre le saint Josse ou le saint Hyacinthe, images banales de la Contre-Réforme, et les planches pour la traduction de l’Imitation par Le Maistre de Sacy, à l’iconographie recherchée, elles-mêmes bien éloignées de celles pour la traduction due à Corneille ! Le langage des images n’était pas compréhensible pour tous et elles ne pouvaient parler qu’à des yeux avertis : Bosse lui-même n’a-t-il pas été stupéfait de constater que des personnes qu’il avait rencontrées étaient incapables de regarder une estampe et d’en reconnaître le sujet ?

Provenance

Cet article a été conçu dans le cadre de l’exposition « Abraham Bosse, savant graveur » présentée à la Bibliothèque nationale de France du 20 avril au 11 juillet 2004. 

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