Un héritage pour demain

La démocratie, état où la souveraineté populaire s’exerce dans le respect des droits de l’individu, est devenue une référence. Les droits universels de l’homme sont à leur tour considérés comme un idéal commun ; l’égalité devant la loi est la règle dans toute démocratie authentique.

Les promesses formulées jadis n’ont pas toutes été tenues, au point que, au 20^e siècle, on ne s’est plus réclamé volontiers des Lumières et les idées portées par des mots comme « humanisme », « émancipation », « progrès », « raison », sont tombées en discrédit.

Les adversaires de l’émancipation se sont révélés plus résistants qu’on ne l’imaginait, l'obscurantisme et l'oppression se manifestent avec de nouveaux visages.

L’ennemi le plus redoutable est venu de l’intérieur même des Lumières. Après les dérives du scientisme au service des régimes totalitaires, l’idée que le règne de la raison produit nécessairement le bien commun s'est avérée indéfendable.

La souveraineté du peuple est préférable à la théocratie, mais la volonté populaire peut errer sous l’effet d’une propagande bien orchestrée.

À force de valoriser l'individu, la société s'atomise et ses membres sont condamnés à l’angoisse de la solitude. Le « désir de réputation », l’« ardeur de faire parler de soi », la « fureur de se distinguer » perçus par Rousseau sont devenus les principaux mobiles de leurs actes.

L’économie semble aussi avoir oublié qu’elle a pour but de servir le bien-être commun, et fonctionne selon un autre principe : le développement pour le développement, la croissance pour la croissance.

Pour les Lumières, la finalité humaine se substitue à la finalité divine, la quête du bonheur évince celle du salut. Mais notre temps est devenu, à bien des égards, celui de l’oubli des fins et de la sacralisation des moyens.

Dévoyé, le programme des Lumières réclame une refondation qui préserve l’héritage du passé en le soumettant à examen critique.

Les Lumières restent une pensée en action permettant à chaque génération de vivre, selon le mot de Kant, « une époque en voie d'éclairement ».